Il observait la nuit. Il notait chaque détail, de l'épaisseur du croissant de lune au trajet de la limace qui cheminait lentement à ses côtés. L'air nocturne qui courait sur la terrasse était revigorant.
Sa cigarette pendait au bout de ses doigts. Bien que fumer n'était pas une habitude chez lui, il lui arrivait parfois de ressentir le besoin pressant d'une cigarette. Le besoin de sentir la fumée, et avec elle le poison, s'infiltrer doucement dans ses poumons. Ca le soulageait. C'était, en somme, troquer un mal contre un autre. Sa gorge rauque soulageait son esprit encombré.
"Quelle ironie" pensa-t-il. Se faire du mal lui donnait une illusion de contrôle à laquelle il pouvait se rattacher pendant quelques instants. C'était comme s'il se vengeait sur son moi futur de ce que son moi passé avait manqué. C'était idiot. Et inutile.
Il écrasa une énième cigarette, et se résolut à quitter la fraîcheur apaisante de la nuit. Après avoir reposé le paquet où il l'avait trouvé, il fit quelques pas vers la porte de la chambre qui était entrebâillée. Il s'appuya sur le chambranle pour mieux contempler la forme étendue sur le lit.
La vision des doux traits de son visage endormi l'apaisa. Ses yeux caressèrent les courbes de son corps. Il était tellement beau, ce corps. Fin et musclé, il avait une forme reconnaissable entre toutes. La taille fine, peu de courbes et des muscles ciselés. Un ventre un peu rond, des fesses ayant la dimension parfaite pour tenir dans les mains. Et des mains... Des mains douces et résistantes, des mains magnifiques.
Mais tout cela n'était rien comparé au visage. Un visage androgyne encadré par de courts cheveux noirs, aux pommettes saillantes et aux lèvres sombres et pulpeuses. Ses yeux, fermés pour l'instant étaient d'un marron profond dans la contemplation duquel on pouvait se perdre facilement.
Il se dégageait de ce visage endormi une telle sérénité, une telle plénitude qu'on sentait un grand calme s'infiltrer en soi.
Il réalisa quelque chose alors qu'il s'attardait à contempler les cheveux ébouriffés par l'oreiller. Lui qui était convaincu que rien n'avait de sens ici-bas, il avait trouvé quelque chose qui avait un sens pour lui. La personne allongée devant lui... leur relation avait un sens. Sans s'en rendre compte, il lui avait donné de l'importance. Et il aimait l'idée qu'ils puissent être important l'un pour l'autre. Qu'il puissent donner un sens aux événements, aux actions de l'autre. C'était une idée qui s'introduisait petit à petit, et qui lui faisait du bien.
P'tain ! ce que tu écris bien !
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